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La « Grande Guerre » entre souvenir et oubli

La « Grande Guerre » entre souvenir et oubli
Le 11 novembre 2018 a eu lieu la commémoration du centenaire de l’armistice qui a mis fin à la Première Guerre mondiale. Quelle mémoire garde-t-on aujourd’hui des événements, des victimes et des traumatismes d’une guerre qui a ravagé l’Europe de 1914 à 1918 ? De quoi se souvient-on et qu’est ce qui a été réprimé et perdu ?

Ces questions fondamentales ont été le fil conducteur du Forum Z « Lost Memories of WW1 » qui s’est déroulé le jour même du centenaire. Coordonné par Denis Scuto et Sandra Camarda du C²DH, la manifestation a été organisée en collaboration avec le Centre de Documentation sur les Migrations Humaines (CDMH), le Centre National de l’Audiovisuel (CNA) qui a aussi prêté ses locaux à la manifestation, le Centre Culturel Régional Dudelange Opderschmelz et la Radio 100,7.

Au cours d’un « history slam » chronométré, six chercheurs ont fait des présentations succinctes de sujets liés aux « souvenirs perdus » de la Première Guerre mondiale. Première oratrice, Antoinette Reuter du CDMH s’est posé la question si la « Grande Guerre » a mis les femmes au travail, pour donner des exemples montrant qu’au Luxembourg, des femmes ont été présentes dans la vie économique bien avant 1914. Denis Scuto s’est ensuite penché sur les « mémoires oubliées » de trois hommes au vécu caractérisé par la situation complexe de nos régions où la nationalité ne correspondait souvent pas au lieu de naissance ni de résidence, et où les uns pouvaient passer d’un pays belligérant à l’autre au cours de la guerre, subissant en plus les affres de la déportation ou des travaux forcés.

Le Luxembourg vit aussi le passage d’un grand nombre de prisonniers de guerre russes. Soldats du corps expéditionnaire russe, ils avaient combattu dans les rangs de l’armée française. Beaucoup de ces prisonniers avaient réussi à s’évader des camps de guerre allemands, certains prenant la route du Luxembourg où ils trouvaient notamment du travail dans l’agriculture. Dans son bref exposé, Inna Ganschow (C²DH) indiqua qu’il se trouvait même des cas où ces hommes furent aidés dans leur fuite par la population civile.

Thomas Kolnberger (Université du Luxembourg) quant à lui se pencha sur les sépultures et les cimetières où furent d’abord ensevelis puis officiellement commémorés les soldats morts. Un sujet aux nombreuses facettes, allant des tombes improvisées sur les lieux de bataille aux champs d’honneur érigés dans un but de propagande durant la guerre, de commémoration haute en symbolique après 1918.

Quels « sons » la Grande Guerre a-t-elle laissés ? La technique de l’époque ne permettait pas des enregistrements en direct d’actions militaires, précisa Stefan Krebs du C²DH. Pourtant, les sons et bruits avaient pris une ampleur et une intensité nouvelle sur les champs de bataille de 1914 à 1918, à en juger par les témoignages écrits. A travers des attaques aériennes, des chansons patriotiques voire même l’absence de sons, à cause d’usines mises à l’arrêt par exemple, le son de la guerre était également présent dans la vie civile.

Ludwig Vogl-Bienek (Université de Trèves) présenta un aspect peu connu de l’histoire de la Première Guerre mondiale, l’utilisation de diaporamas à sujets militaires dans un but d’information et de propagande à travers des conférences destinées au grand public.

Après les débats par groupes qui suivirent les six présentations, les participants purent assister à un spectacle de lanterne magique de l’ensemble « Illuminago » montrant des diapositives des années 1914-1918 au moyen d’un appareil de projection historique et ceci dans un contexte de mise en scène théâtrale.

'IN TREUE FEST! Stricken und Sterben im Ersten Weltkrieg'

Présentation de lanterne magique par l'ensemble "Illuminago"